Petite histoire du service
militaire 1789-1996 |
En généa1ogie, bien des chercheurs
désirent savoir combien de temps leurs ancêtres ont " servi sous les
drapeaux ", selon l'expression consacrée.
Ce petit texte devrait les renseigner et nous allons voir qu'il fallut
attendre 1905 pour que le Service Militaire soit réellement obligatoire
pour
tous, donc vraiment démocratique.
Avant le 13 juillet 1789, sous l'ancien régime, l'armée française était
composée uniquement d'engagés volontaires, français ou mercenaires
étrangers, dont beaucoup de Suisses et d'Allemands.
Un décret du 13 juillet 1789 créa, à Paris, la Garde Nationale. Le Garde
National, était un civil qui revêtait surtout son uniforme, payé, de ses
propres deniers, pour des prises d'armes les jours de fête. Il n'était
pas vraiment un militaire, encore moins un soldat.
Le décret du 13 juin 1791 permit de recruter, pour l'Armée, dans la
Garde Nationale, des volontaires destinés à participer à des conflits
hors de nos frontières, ce fut ce que l'on appela la " Conscription
libre ".
Toujours en 1791, les décrets du 29 septembre et du 14 octobre,
rendirent obligatoire l'appartenance à la Garde Nationale pour les
citoyens " actifs
", c'est-à-dire tous ceux qui avaient le droit de vote, de 18 à 60 ans.
Le 23 août 1793, ce fut le décret de la Convention sur la " Levée en
masse ". Tous les Français célibataires ou veufs sans enfant, de 18 à 25
ans,
étaient en situation de " réquisition permanente " pour le service armé
et ce sans aucune limitation de durée.
La loi Jourdan, du 5 septembre 1798, institutionnalisera la levée en
masse avec la conscription des jeunes de 20 à 25 ans pour un service
militaire, en temps de paix de 5 ans, et de durée illimitée en temps de
guerre. Le service était donc désormais obligatoire, en complément du
volontariat.
A partir de 1802, le conscrit peut se faire remplacer. Il doit se
trouver un remplaçant qu'il paye.
En 1804, c'est l'instauration du " tirage au sort " qui a de beaux jours
devant lui !!
En 1805, le décret du 29 août, institue les Conseils de révision et
organise le remplacement. On fixait à l'avance le nombre de conscrits à
atteindre et on incorporait les plus jeunes de la classe mobilisée et
l'on s'arrêtait au nombre de mobilisables fixé d'avance.
Ce système était injuste car il dispensait du service les natifs des
trois premiers mois de l'année.
Les mobilisés pouvaient payer un non mobilisé comme remplaçant. Si ce
dernier était tué, le remplacé devait être incorporé, ou se payer un
nouveau remplaçant. Ce système, qui avantageait les gens riches, n'était
guère démocratique !!
A partir de 1808, les soutiens de famille et les séminaristes furent
exemptés de service.
Le 4 juin 1814, l'article 12 de la Charte du Roi Louis XVIII abolit la
conscription. Ce fut le retour à l'ancien régime avec une armée
uniquement
composée d'engagés volontaires.
Le 12 mars 1818, la Loi Gouvion Saint Cyr rétablit la conscription par
tirage au sort avec possibilité de remplacement. Le service était fixé à
6
ans.
L'effectif, sur pied de paix, de l'Année était fixé à 240.000 hommes
avec un contingent annuel de 40.000 hommes.
Le 8 juin 1824, la durée du service passa à 8 ans, avec un contingent
annuel de 60.000 hommes.
Sous le règne de Louis-Philippe, la Loi Soult, du 21 mars 1832, établit
un service de 7 ans par tirage au sort.
Sous le IIème Empire, le 26 avril 1855, le remplacement est supprimé
mais les appels par tirage au sort peuvent éviter le service militaire
en payant une " indemnité " de 2800 francs qui alimente une caisse de
l'Armée.
Le 4 février 1868, c'est la Loi Niel qui rétablit le système du
remplacement et supprime le système de l'exonération payante. Le service
est désormais fixé à 9 ans !!
Au début de la IIIème République, la Loi Cissey, du 27 juillet 1872,
établit le service obligatoire pour tous.
Sa durée est fixée par le tirage au sort et les " mauvais numéros " font
5 ans de service contre seulement un an pour les " Bons numéros " ". Les
sursis pour études sont possibles et de nombreuses dispenses sont
accordées aux soutiens de famille, aux enseignants et au clergé.
Le service dans l'active est de 5 ans, puis le libérable est classé pour
4 ans dans la réserve, ensuite 5 ans dans l'Armée Territoriale et enfin
6 ans
dans la réserve de la Territoriale.
Une nouveauté, les " Volontaires d'un an " qui, généralement devancent
l'appel de leur classe, peuvent être libérés après un an de service
moyennant
le versement de 1500 francs. Ce système nouveau était réservé aux
diplômés ou aux soldats ayant passé, un examen spécial. Il était en
grande partie
copié sur le système allemand des " Einjährige-Freiwillige "
(Volontaires d'un An).
L'effectif de l'Armée, sur pied de paix, était alors de 500.000 hommes;
c'était le début de la période de la " paix armée " qui préparait la
revanche
de 1870-1871.
La Loi Freycinet, du 17 juillet 1889, ramena le service à 3 ans. Il
était obligatoire pour tous mais, en fait, il était inégal. Les
dispensés ne faisaient qu'un an de service et les exemptés faisaient un
service auxiliaire. Une libération conditionnelle après un an de service
pouvait être accordée aux étudiants et aux soutiens de famille. Cette
loi créa aussi les engagements de cinq ans. Après avoir servi pendant 3
ans dans l'Armée d'
active, on passait pendant 9 ans dans la réserve, puis 6 ans dans la
Territoriale et ensuite 7 ans dans la réserve de Territoriale.
L'effectif de
l'Armée, sur pied de paix passait à 610.000 hommes.
Le 21 mars 1905, la loi ramena la durée du service à 2 ans, au grand dam
du haut commandement de l'Armée. Il était obligatoire pour tous et les
dispenses étaient remplacées par des sursis. Le libérable passait dans
la réserve pour 11 ans, puis dans la Territoriale pour 6 ans et ensuite
dans la
réserve de la Territoriale pour 6 ans.
L'année Allemande ayant beaucoup accru son effectif en 1912, le haut
commandement obtint le retour au service de trois ans le 7 août 1913,
pile
un an avant le début de la Grande Guerre.
Les hommes de la classe 1911, appelés sous les drapeaux début octobre
1911 et qui étaient libérables fin septembre 1914, feront donc, en plus
de leurs trois ans de service, les 4 années de guerre et les plus gâtés
d'entre eux ne seront libérés qu'en 1919 car l'Armistice n'était pas la
paix, s'ils ont survécu à la guerre ils ont été " Sous les drapeaux "
pendant plus de sept ans.
Le 1er avril 1923, le service était réduit à 18 mois et les sursis
étaient revus.
En 1928, par décret du 31 mars, le service est encore réduit et passe à
un an.
Le 16 mars 1935, suite aux " bruits de bottes " sur l'autre rive du
Rhin, la durée du service passe à deux ans à titre exceptionnel
(réquisition) jusqu'
en 1939, puis c'est la mobilisation et la guerre.
Après la défaite de juin 1940, sous l'occupation allemande,
l'incorporation des classes est supprimée en France mais elle est
maintenue dans nos
colonies.
Ensuite, dans la nouvelle armée française, le 7 octobre 1946, le service
est rétabli avec une durée d'un an.
Le 30 novembre 1950, il passe à 18 mois.
Le 4 décembre 1956, à cause de la guerre d'Algérie, le gouvernement Guy
Mollet, tout en affirmant que la durée légale du service reste fixée à
18
mois, décide le maintien sous les drapeaux des appelés pendant 9 mois.
Mais le contingent fera jusqu'à 29 mois et même 33 mois pour certaines
classes.
Les classes de réservistes rappelés accompliront six mois en Algérie.
Le 7 janvier 1959, toujours à cause de la guerre d'Algérie, la durée
légale du service passe à deux ans, ce qui permet au gouvernement de
faire des
économies sur la solde des appelés entre 18 et 24 mois !!
Les classes sont maintenues sous les drapeaux au-delà de la durée légale
comme auparavant.
En 1962, après la fin de la guerre d'Algérie, le service est réduit à 18
mois et le 15 octobre 1963, il passe à 16 mois.
Le 9 juillet 1965,la Loi Debré réduit encore le service militaire à 12
mois mais il reste à 16 mois pour l'aide technique, la coopération et
les
professions médicales.
Elle créée aussi le volontariat féminin.
Le 10 juin 1971 est créé le " Code du Service National " avec âge
d'appel au service actif entre 18 et 22 ans.
En janvier 1992 le service est ramené à 10 mois !
Enfin, le 22 janvier 1996, le Président Chirac se prononce pour la
professionnalisation de l'Armée qui, pour l'active ne sera plus composée
que
d'engagés volontaires."
Bref, la boucle est donc bouclée de 1789 à 1996.
La véritable Armée Nationale composée de conscrits a disparu et nous
sommes revenus à la situation de l'Ancien Régime !!! |